La technique Alexander, longtemps réservée aux artistes, est une technique d’éducation corporelle qui vise à réintégrer l’attention et le contrôle cérébral dans le mouvement corporel pour adopter une posture plus fonctionnelle et détendue. Reconnue dans le domaine artistique, elle pourra également corriger la posture avachie  de Monsieur Toutlemonde et avoir un certain effet sur la psyché. On vous explique tout. 

Le corps est une machine formidable.

Il a fallu des millions d’années d’évolution à l’être humain pour que nous puissions tenir debout sur nos deux jambes.

Certains d’entre nous ont développé des capacités proprioceptives et sensorielles si fines qu’ils flirtent avec la grâce et le génie dans ce qu’ils font.

C’est le cas des métiers d’art et de création : sculpteur, peintre, ébéniste, danseur, musicien, acteur, chanteur etc…  Mais, parfois, il faut plus que du savoir-faire pour sortir du lot. Il faut du talent, ce sens aiguisé du corps pour aboutir à un parfait alignement corps, esprit, énergie au juste moment, dans l’instant présent.

Comment font-ils pour avoir ce talent ?

Personnellement, j’ai toujours été fascinée par les danseurs lesquels, grâce à leur entrainement intensif, se meuvent avec fluidité et légèreté dans une déconcertante facilité.
Il n’en est rien, bien évidemment.

Des heures et des heures d’entraînements, de répétitions, de ré-ajustements quasi-militaires, difficiles physiquement et émotionnellement pour les danseurs sont souvent nécessaires.

Le monde de la danse n’est pas tendre avec ses élèves et l’exigence du mouvement parfait provoque peurs, stress et émotions qui limitent les possibilités du corps à exprimer ce qui attendu. Cette exigence du geste parfait se retrouve dans tous les domaines ou l’excellence est de mise : Musique, Sport,  Arts du Cirque, Comédie, Chant, etc..

La réussite d’une performance artistique est souvent la résultante d’un alignement parfait entre le corps, l’esprit et l’énergie de celui qui la réalise. L’artiste est pleinement dans le présent en train de se réaliser et c’est l‘instant de grâce, éphémère, rare et précieux.

Pour en arriver à cette consécration, que de travail ! que de lutte acharnée contre soi-même !

Pourtant, il est possible de faire différemment. Peu répandue en France, la technique Alexander qui se situe dans le champ de l’éducation peut faire des merveilles pour faire progresser un artiste dans son art. Elle gagne à être connue aussi bien dans les milieux artistiques qu’auprès du grand public.

La technique Alexander, une technique qui redonne son intelligence au corps

Matthias Alexander était un acteur australien qui se trouvait en difficulté sur scène pour cause d’enrouement de sa voix. Après plusieurs consultations médicales sans résultats probants, Alexander s’est demandé s’il ne provoquait pas lui même ce symptôme.

Grâce à une longue phase d’observation de sa posture et de sa technique vocale, il se rendit compte qu’il était effectivement à l’origine des comportements posturaux inadéquats provoquant son aphonie. Il mit 10 ans à se défaire de ses schémas posturaux et développa un enseignement : la technique Alexander, pour rééduquer les artistes et non-artistes vers de meilleures habitudes posturales et une nouvelle conscience du corps.

La technique Alexander est très répandue dans les pays anglo-saxons et scandinaves ; de nombreux conservatoires de musique et d’art dispose de leur propre professeur.
La compétence artistique ne suffit plus à former un artiste performant, il faut aussi parfois pouvoir corriger des schémas posturaux limitants en travaillant la conscience corporelle et la proprioception.

En dehors du champ artistique, à quoi sert la technique Alexander ?

La contrainte ergonomique est partout. Assis à nos bureaux pendant des heures devant un ordinateur, nous sommes sédentaires. Nous ne faisons plus travailler nos muscles profonds et l’usage des tablettes et smartphones vient malmener nos cervicales. Les tensions s’installent, nos corps prennent de mauvaises habitudes posturales et c’est la lombalgie ou autre névralgie cervico-brachiale…

L’ostéopathe, le kinésithérapeute ou le chiropracteur nous aidera ponctuellement à remettre nos corps dans le bon alignement mais bien souvent nos vieilles habitudes posturales reviennent au galop et le corps repart de travers. Et il n’est pas rare d’expérimenter à nouveau le même blocage handicapant.

Dans ce cas, la technique Alexander peut rompre le cercle vicieux en corrigeant et en apportant l’autonomie dont on a besoin. L’élève apprend à se mouvoir différemment, à s’assoir sans douleur, à prendre conscience de ses schémas posturaux pour les remplacer par d’autres plus fonctionnels et efficaces.

Tout un programme qui se fait en une trentaine de séance !

Un cours de technique Alexander : Comment ça se passe ?

Les séances sont individuelles et durent environ 45 minutes.

Pour ce test, j’ai rencontré Laetitia Baudoin, professeur de technique Alexander à Paris et à Vincennes.

Laetitia Baudoin a d’abord eu une première vie de musicienne flutiste avant de devenir professeur de technique Alexander.
Elle a découvert la technique comme un outil de gestion du stress et a pu mesurer empiriquement combien celle-ci soutient la performance de l’artiste en libérant sa spontanéité dans l’instant présent. Aujourd’hui, elle enseigne à ses élèves, qui ne sont pas forcément des artistes, comment intégrer de nouvelles habitudes posturales plus opérationnelles.

Comment ça se passe ?

Laetitia m’a invitée à m’installer sur la table de massage sans fermer les yeux. La technique, bien que relaxante, ne vise pas relaxer mais à apporter plus de conscience et de contrôle dans le corps.
En me guidant oralement et manuellement, elle m’a invitée à libérer ma tête, et allonger mon cou et mon dos,  puis elle a placé ses mains sur certaines parties de mon corps en me demandant de les relâcher sans forcer, par la pensée.
Ce n’est pas très évident à faire, puisqu’il faut pouvoir sentir son corps et ses tensions.
Dans notre culture matérialiste qui voit le corps comme un objet, beaucoup d’entre nous sommes déconnectés du corps. Nous négligeons nos douleurs et nos tensions. La technique permet de renouer le lien corps-esprit au fil des séances, c’est un accompagnement nécessaire et dans la bienveillance qui nous aide à comprendre et à intégrer la bonne posture.

Selon la technique Alexander, c’est l’axe tête-cou-dos qui détermine l’équilibre du corps et les schémas posturaux. C’est principalement sur cet axe que le professeur travaille avec son élève. Il est appelé « contrôle primaire » et s’ajuste constamment dans nos mouvements quotidiens. L’idée est d’obtenir le juste équilibre dans tous les mouvements de la vie quotidienne.

 

L’inhibition : Refuser mentalement de faire quelque chose avant de le faire

L’inhibition nerveuse est un concept fort de la technique Alexander qui n’a rien à voir avec l’inhibition de la psychanalyse freudienne.

Pour rompre avec les habitudes ancrées dans le corps, il est nécessaire de faire intervenir la volonté du mental. L’une des premières choses que l’on apprend en technique Alexander est le refus d’agir. Par exemple, lorsque l’on se prépare à s’assoir, on choisit mentalement de refuser de le faire afin de contre-carrer les schémas posturaux nuisibles. Ainsi on peut choisir une autre façon de s’assoir.

C’est d’ailleurs très déroutant de choisir de ne pas agir.
Notre manière de vivre est tournée vers le but final de l’action, plutôt que sur les moyens d’agir. La technique Alexander permet de suspendre l’action afin de choisir consciemment la meilleure voie à prendre. On peut ainsi rééduquer progressivement le corps et installer de nouvelles bonnes habitudes.

Pour corriger sa posture durablement et devenir autonome, il faut compter une trentaine de séances mais dès la dixième de séances, on remarque déjà le changement. Même si la technique se situe dans le champ de l’éducation, les effets thérapeutiques sont évidents dès la première séance :

  • Légèreté
  • Détente
  • Conscience du corps

A qui s’adresse la technique Alexander ?

Si vous rencontrez des problèmes de dos récurrents, une mauvaise posture liée à la confiance en soi ou à la gestion du stress ou si encore vous êtes un artiste qui souhaite progresser dans son art, je vous conseille vivement de tester la technique Alexander. Elle pourrait bien changer votre vie.

Pour plus d’informations, consultez le site de l’APTA, l’association française des professeurs de la techniques Alexander. On compte aujourd’hui seulement une centaine de professeurs en France. Un annuaire est à votre disposition sur le site pour trouver votre professeur.

Et vous connaissiez-vous la technique Alexander ? Racontez-nous !