Encore aujourd’hui, la pédagogie noire a la vie dure…
Devenir parent est un rôle particulièrement difficile à remplir : personne ne nous a enseigné à bien tenir ce rôle. Les seuls modèles auxquels on peut se référer et qui parfois nous accompagnent encore dans la vie sont nos parents. Et ils ont fait ce qu’ils ont pu, en ayant pour modèles, leurs propres parents, nos grands parents !
Alors en prenant en compte cette réalité, on peut considérer qu’ils ont rempli cette mission au mieux car nous sommes aujourd’hui des adultes adaptés, en vie et en bonne santé.
Nous pouvons éprouver de la gratitude à leur égard pour cette vie qu’ils nous ont donné et permis de conserver. Cependant certains d’entre-nous ont parfois connu des relations difficiles avec leurs parents, ils ont été élevés « à la dure » comme on dit.
L’éducation « à la dure » ou pédagogie noire, comme l’appelle Alice Miller, psychanalyste spécialiste de l’enfance, c’est vraiment le coté obscur de l’éducation qui tient plus du dressage que de l’instruction.
La pédagogie noire regroupe un arsenal de pratiques particulièrement limitants pour le futur adulte : négation des besoins et émotions de l’enfant, châtiments corporels, culpabilisation et chantage affectif, dissimulation d’information, injonctions paradoxales, humiliation…
Dans ce contexte, le parent, qui pense toujours agir pour le bien de son enfant, est alors tout puissant du point de vue de l’enfant. Dans une position de sachant, il détient la vérité sur le monde, sait ce qui est bien ou mal, analyse les besoins, autorise, ignore ou réprime l’expression des émotions de son enfant selon son propre prisme perceptif.
J’ai été moi-même un enfant élevé à la pédagogie noire, pour mon plus grand bien, évidemment. J’en connais bien les ressorts et les impacts.
Heureusement, nous savons aujourd’hui que la violence n’a plus sa place dans l’éducation de nos enfants. Pourtant, il nous arrive encore de déraper, pour notre plus grand désarroi. Je vais vous raconter une scène dont j’ai été témoin il y a quelques jours. Il ne s’agit pas ici de juger le comportement d’une maman mais de montrer comment certains gestes malheureux pourraient être évités si nous étions plus présents à nous-mêmes et aux autres.
Derrière toute action, il y a une intention positive.
C’est un des postulats de PNL (Programmation Neuro-Linguistique) auquel je crois fermement. Derrière chaque geste que nous faisons, il y a une intention positive pour nous-même ou les autres. Ainsi lorsqu’un enfant fait quelque chose qui ne nous plait pas, il faut chercher à comprendre quelle est son intention positive avant de le corriger. Gardons ce postulat de PNL à l’esprit pour la scène qui va suivre.
Une femme entre dans un bus avec un enfant âgé d’environ deux ans, assis dans une poussette. L’enfant n’est pas attaché dans sa poussette et la maman est en train de téléphoner. Elle avance dans le bus avec sa poussette, le téléphone coincé entre son oreille et son épaule. Elle vérifie les stations sur le plan affiché dans le bus, raccroche et stationne la poussette dans l’espace prévu a cet effet. Elle se positionne derrière la poussette.
Son enfant qui ne parle pas encore très bien, se contorsionne dans sa poussette sans en descendre et cherche le regard de sa mère. Il lui demande de venir à côté de lui. Sa mère, attentive au trajet du bus, pense qu’il essaye de sortir de la poussette.
Elle fait le tour pour lui faire face, lui explique qu’il ne doit pas bouger pour sa sécurité, (pour son bien) pour éviter de tomber. Elle attache la ceinture de la poussette et lui répète qu’il ne doit enlever la ceinture sous aucun prétexte. L’enfant ne souhaite pas être harnaché, gigote un peu mais ne proteste pas. La maman repasse derrière la poussette.
A nouveau, il parle pour attirer le regard de sa mère qui est en train de regarder son Smartphone. Il se contorsionne et tripote son harnais. La maman s’en rend compte. Elle lui rappelle un peu plus fermement les consignes de sécurité. Mais l’enfant continue d’attirer son attention, il finit par chanter une comptine et se retourne pour voir si sa mère lui est enfin attentive. Malheureusement, la maman surveille le trajet sur le plan, tout occupée à maintenir son équilibre vertical et la position de la poussette qui se déplace dans les mouvements de la route .
L’enfant tripote, à nouveau, son harnais. La maman entends le cliquetis du harnais, se retourne vers son enfant, et le gifle deux fois, en le disputant grassement rappelant les consignes de sécurité.
…
Une histoire de perception
Au final, quelles étaient les intentions positives des deux protagonistes de cette histoire ?
L’enfant voulait attirer l’attention de sa mère, pour partager quelque chose avec elle.
La mère voulait arriver à destination tout en faisant attention à ce qu’il n’arrive rien à son enfant.
La transaction aurait pu se passer différemment si la maman n’avait pas été stressée par les différents éléments du trajet. C’est souvent dans une situation de stress que nous perdons nos moyens d’ailleurs. Nos ressources pour faire face à la situation sont débordées et il arrive que nous basculions dans la violence pour « supprimer un problème ». Dans le cas que je viens d’énoncer, il n’y avait pas de problème réel. L’enfant ne contestait pas les consignes de sécurité, c’est véritablement la perception de la réalité de la maman qui était défaillante. A cause du stress.
Un des problèmes majeurs de la relation parent-enfant est notre capacité à être pleinement présent à l’autre.
C’est à nous, parents, de savoir gérer notre stress pour ne plus voir la réalité par le petit bout de la lorgnette. Nous négligeons nos enfants parce que nous sommes accaparés par nos activités, le problème au travail, la réunion de parents d’élève de la semaine prochaine, notre smartphone, internet, etc… Il est temps de vivre dans le présent.
Devenir parent est sans doute le job le plus difficile de la vie
Quand bien même il nous est arrivé de basculer du coté obscure de l’éducation, il est toujours possible de revenir sur le chemin de la parentalité positive. Voici quelques principes à respecter pour avancer sereinement dans votre rôle de parent :
Installer une relation de confiance avec son enfant
C’est avant tout être dans l’instant présent sans jugement. Lorsque l’enfant est petit, il faut être attentif à ses émotions et à ses besoins, savoir les accueillir, les reformuler et inciter à les exprimer avec ses mots. Gagner sa confiance c’est aussi savoir communiquer et expliquer sur vos valeurs, pourquoi il y a des interdictions. Un enfant peut tout comprendre dès lors qu’on lui explique.
Rester positif dans votre perception de votre enfant
Rappelez-vous le postulat de PNL vu plus haut : derrière toute action, il y a une intention positive. C’est à vous de la comprendre ou bien de lui demander de vous l’expliquer. Pour l’exemple : Un jour mon fils (4 ans) m’a expliqué qu’un de ses camarades avait annoncé à toute la classe qu’il avait la maladie des os de verre et qu’il ne fallait pas jouer brutalement avec lui, dans la cour. Le lendemain, mon fils l’a poussé dans la cour pour voir si son camarade allait devenir vert. Bien sûr il a été puni pour ça, heureusement l’enfant n’a pas été blessé. En me rapportant cet épisode, j’ai compris qu’il n’avait pas compris ce qu’était la maladie de verre et qu’il avait été poussé par la curiosité. Je ne l’ai pas grondé et l’ai félicité pour m’avoir raconté cet épisode malheureux car j’ai pu lui expliquer ce qu’était la maladie des os de verre.
Valoriser ses comportement positifs
Les études montrent que focaliser notre attention sur les comportements négatifs les ancrent. Mieux vaut ancrer les comportements positifs, donc valorisons les !
Etre un exemple
Ne pas hésiter à montrer ses émotions et à les exprimer. Vivez les valeurs que vous souhaitez lui transmettre. Domptez votre stress. Rappelez-lui que vous êtes son parent, que vous l’aimez, que vous ne l’abandonnerez pas. Pour certains enfants ce n’est pas forcément clair. Et enfin, bannissez la violence de votre gestuelle afin qu’à son tour la violence ne soit pas une option envisageable.
Et sinon, j’ai une question, comment réagissez-vous lorsque vous êtes témoin de violence entre un parent et un enfant ? J’avoue, moi, je ne sais jamais trop quoi faire….
Merci pour cet article fort intéressant qui se trouve exactement sur le chemin de mon travail actuel.
si je croise le regard de l’enfant j’essaie de lui sourire, de lui remonter le moral avec mon regard…. je ne sais pas si ça sert à quelque chose…. m’enfin je fais ça…. je me dit que si ça peut l’apaiser tant mieux et que si c’est inutile ça ne peut du moins pas faire de mal….ah oui dans cette situation précise, vue que l’enfant est petit je me serai peut être permise de répondre au besoin d’attention de l’enfant en « papotant » avec lui. Il est compliqué de conseiller des parents qui ne demandent rien alors pourquoi pas montrer l’exemple, c’est une idée comme ça. Sinon il m’est déjà arriver d’être de sortie avec mon fils de 11 mois et d’être tendue. A deux reprises j’ai eu droit à un mot gentil du genre » allez, c’est rien détendez vous » dit vraiment avec gentillesse et bienveillance, d’un tont apaisant. Les deux fois cela m’a fait un bien fou . Quelqu’un que l’on croise et qu’on ne connait pas, je dirai même dont on ignore tout n’apprécierai pas, pour la plupart, qu’on se permette d’intervenir en donnant des leçons. C’est déjà délicat avec les proches, alors les inconnus… si vraiment le parent à l’air débordé je me dit qu on peut tout au plus proposer son aide ou une parole apaisante, ça ne fait pas de mal
Merci pour votre commentaire. Personnellement je ne sais jamais comment intervenir alors je ne fais rien, de peur d’être maladroite.
C’est comme lorsque je vois des gens pleurer dans la rue, avant je les ignorais. Maintenant je m’arrête en demandant si je peux faire quelque chose. Je suis toujours éconduite mais l’important pour moi est de montrer de la compassion, un peu de chaleur humaine. Comme vous dites, ça ne fait pas de mal.
Excellent !!!!J adore comme l autre pour lequel j ai aussi donné un avis!!Merci beaucoup de confirmer ce qui me touche depuis tant d années